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Papi Juice!

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juin 2021

Collage of Papi Juice.Collage of Papi Juice.

Dans cette série de portraits, nous vous présentons les personnalités qui nous inspirent le plus, des créatifs, des éducateurs, des activistes, des leaders de communautés et quelques super héros du quotidien qui nous tiennent en haleine. Nous vous ferons découvrir leur vie quotidienne, leurs espaces de vie et de travail. Nous vous parlerons de motivation et d’inspiration et, bien sûr, de tout ce qui a trait au style.


Rencontrez les muses du mois : DJ Adam Rhodes, illustrateur et directeur artistique Mohammed Fayaz et DJ Oscar Nñ, individuellement des artistes inspirants à part entière, et ensemble, Papi Juice, un collectif artistique qui vise à affirmer et célébrer la vie des personnes de couleur queer et trans. À la croisée de l’art, de la musique et de la vie nocturne, les événements légendaires du collectif à New York sont la preuve du pouvoir révolutionnaire des fêtes.


En l’honneur du mois des fiertés (Pride), nous nous sommes entretenus avec ces trois amis pour parler de visibilité, d’accessibilité et d’intentionnalité. Poursuivez votre lecture pour en savoir plus sur ce qu’ils souhaitent nous dire.



Left: Portrait of the Papi Juice collective standing outside. Right: Close-up of Papi Juice merch.Left: Portrait of the Papi Juice collective standing outside. Right: Close-up of Papi Juice merch.

Comment vous êtes-vous rencontrés tous les trois ?



Oscar : Nous nous sommes tous rencontrés sur Tumblr ! En 2013, nous partagions tous nos intérêts communs et nous développions nos identités en dehors de ce que les médias nous accordaient, qu’il s’agisse de photos de films en langue étrangère, de photos de modèles noirs et bruns iconiques ou de selfies redéfinissant notre estime personnelle. C’est là que nous nous sommes découverts, nous et les autres. Notre profonde affection pour le regretté Mark Aguhar, un artiste qui nous a inspirés et nous a tant appris sur le démantèlement des systèmes d’oppression, a constitué un lien indéfectible. C’est sur Tumblr que nous avons commencé à parler de la solidarité inter-BIPOC (Black, Indigenous and people of color ; Noirs, Indigènes et gens de couleur) et de la beauté et du pouvoir de nos nombreuses identités. Je ne sais pas si c’était une sorte d’algorithme, mais nous avons commencé à nous suivre les uns les autres et c’est ainsi que nous sommes devenus amis.

Une amitié sur Tumblr, j’adore !



Oscar : Tu sais que c’est vieux si ça a commencé sur Tumblr.


Quelle est l’histoire à l’origine du nom « Papi Juice » ?


Mohammed : Oscar et Adam ont échangé des idées pendant quelques jours, en cherchant quelque chose qui soit à la fois insolent et séduisant. L’une des premières idées est venue de notre amie Joelle, une artiste basée à Chicago, qui nous a suggéré de l’appeler « Dominican Baby Shower » ! C’était exactement l’ambiance que nous voulions, mais c’était un peu long. Quelques sodas à la tequila et des idées bizarres plus tard, nous sommes tombés sur « Papi Juice », et on a su que c’était parfait.


Alors Papi Juice, c’est quoi au juste ?


Mohammed : Voilà une excellente question… Papi Juice est un collectif artistique et un studio de création qui vise à affirmer et à célébrer la vie des personnes de couleur queer et trans.


Adam : Un jour, on visitait une galerie et Oscar m’a dit : « On devrait faire une fête ensemble ». J’ai répondu illico « Ouais, on devrait », sans savoir exactement là où ça nous mènerait. Nous avons parlé de l’idée d’affirmer et de célébrer nos identités personnelles, ainsi que les identités de nos amis et de nos proches. Nous avons parlé du fait que nous ne percevions pas le genre de visibilité que nous voulions avoir : plus de DJ gays, plus de DJ trans… alors c’est ce que nous avons décidé de faire.


Oscar : Adam dit toujours que nous faisons partie d’une longue lignée de personnes qui ont fait ce travail. Nous faisons partie d’une longue tradition de la vie nocturne. Notre travail ne fonctionne pas en circuit fermé. Nous faisons partie d’une grande constellation de personnes qui rendent la vie nocturne dynamique, non seulement à New York, mais, comme nous l’avons remarqué l’année dernière, dans le monde entier. Nous avons construit une communauté dans le monde entier, de l’Australie à l’Estonie, de l’Afrique du Sud au Vietnam.

Portraits of Oscar Nñ, Adam Rhodes, and Mohammed Fayaz.Portraits of Oscar Nñ, Adam Rhodes, and Mohammed Fayaz.

Pourquoi était-il nécessaire de créer un espace intentionnel pour les QTPOC ?


Papi Juice : Pour beaucoup d’entre nous dans les communautés LGBTQIA+, la vie nocturne est notre point d’entrée pour rencontrer de nouvelles personnes. Il y a quelque chose de triste dans le fait d’attendre toute sa vie d’avoir 21 ans et d’entrer dans des espaces prétendument « queer » et être confronté à des tensions ou au sentiment d’être ignoré, ou pire, fétichisé. C’est la description de la plupart de nos années d’adolescence et du début de la vingtaine. Nous savons que ces espaces sont valables pour certains, mais ils ne sont pas non plus conçus pour beaucoup d’autres, et donc, alors que nous nous en éloignons, nous nous intéressons davantage à la façon dont nous pouvons créer une vie nocturne qui donne plus de pouvoir aux plus marginalisés, sans se plier aux exigences.


Il y avait de nombreux espaces intentionnels QTPOC à New York avant nous, et un paysage culturel dynamique était l’incubateur parfait pour la naissance de Papi Juice. Nous nous considérions comme une alternative aux espaces LGBTQ (lire : homme blanc gay) traditionnels de Williamsburg et Manhattan, et comme une communauté avec un grand groupe de personnes qui recherchaient ces espaces. Nous voulions tous être dans des espaces qui affirmaient notre musique et nos cultures, et des lieux qui étaient des espaces de jeu où nos nombreux genres et identités pouvaient être accueillis et reflétés. Ces affirmations peuvent aller des affiches à la cabine du DJ, en passant par la sécurité et le personnel derrière le comptoir du bar, chaque petit détail compte.


Quelles mesures prenez-vous pour faire de Papi Juice un espace plus sûr et plus inclusif ?


Mohammed : Pas mal de choses. Avant tout événement dans un nouveau lieu, nous estimons qu’il est important de faire une réunion avec la sécurité, pour une présentation rapide de qui nous sommes, de notre communauté, des types de personnes qui pourraient passer, des choses qui pourraient être différentes par rapport à d’autres événements. Les personnes qui ont travaillé par le passé entendent souvent les nouvelles équipes de sécurité dire des choses comme « Oh, comme la fête gay qu’il y a déjà eu », et nous devons leur rappeler qu’il ne s’agit pas seulement d’un public gay, qu’il y a toutes sortes de personnes qui passent, y compris des personnes sous l’égide de la communauté queer et trans, ce qui peut regrouper de nombreuses identités. Le fait d’établir les règles de base avec la sécurité de cette manière permet de créer un climat protecteur sur l’espace, de sorte que la sécurité ne nous considère pas comme de simples personnes qui passent, mais comme des personnes qui travaillent activement pour que l’espace soit agréable.


Notre programmation varie beaucoup. Lorsque nous sommes en mesure de nous réunir en personne, il est très important pour nous d’organiser des événements gratuits en plein air, pour tous les âges, tout au long de l’année. Pour ce genre d’événements, nous indiquons dans les messages communautaires le type de sièges disponibles, l’emplacement des toilettes les plus proches, etc. Nous essayons de comprendre comment les gens se présentent dans un espace, donc si vous ne pouvez pas participer aux soirées du club, nous organisons plein d’autres événements auxquels il vous serait possible de participer.


Adam : Nous incluons également des notes sur l’accessibilité des espaces dans lesquels nous nous engageons.


Oscar : Nous avons des directives communautaires pour chacun des événements que nous organisons et nous demandons à chacun de les lire à l’avance. Ça fait maintenant huit ans que nous gérons Papi Juice, et l’intentionnalité a fait du chemin pou nous. Ça commence à partir du moment où ils voient l’art de Mohammed jusqu’au moment où ils franchissent nos portes et montent dans leur voiture pour rentrer chez eux. Ça ne veut pas dire que tous nos espaces sont accessibles, mais nous faisons de notre mieux avec les moyens dont nous disposons. C’est une chose sur laquelle nous travaillons constamment.



Papi Juice est un collectif artistique, qui organise également certaines des fêtes les plus légendaires de New York. Comment conciliez-vous les deux rôles ?


Oscar: Nous n’avons jamais pensé que nous évoluerions vers un collectif artistique. Papi Juice a commencé des événements nocturnes singuliers. Puis, au fur et à mesure que le travail s’est développé, nous avons commencé à nous engager plus profondément dans l’art, dans le travail de Mohammed. Et puis nous avons également commencé à nous engager dans la photographie des événements. Avec la sélection de chacun de nos programmes et la taille de chacune de nos productions, nous avons commencé à les considérer moins comme des événements singuliers et plus comme des expériences. C’est alors que nous avons commencé à penser que nous pourrions améliorer ces expériences immersives pour notre communauté à travers le prisme d’un collectif artistique. C’est ainsi que nous avons décidé de nous appeler un collectif artistique, parce qu’il ne s’agissait pas seulement d’organiser cette fête et de dire « voici cinq DJ ». Nous pensons en fait très intentionnellement aux espaces que nous construisons.


Adam : Façonner des espaces et des expériences fait partie de notre pratique. Le mot intentionnalité s’aligne sur la pratique artistique dans laquelle nous nous sommes engagés depuis huit ans.


Mohammed : Et la vie nocturne de New York a toujours été à la croisée de l’art, de la musique, et de la mode. Ce qui n’était au départ qu’une fête s’est immédiatement transformé en ces trois grandes avenues.


Les fêtes sont sympas, mais leur portée va bien au-delà.

Mohammed : Historiquement, les personnes homosexuelles et transsexuelles ont dû se cacher. Il y a un long passé de vie nocturne à New York, qui remonte à Harlem et aux fêtes lesbiennes des années 20. Si vous parcourez les années, vous trouverez nos prédécesseurs, les personnes dont nous nous inspirons directement. Et donc je pense que la vie nocturne est un endroit où les gens qui n’ont pas été autorisés à exister à la lumière du jour peuvent se sentir en sécurité. Je pense que c’est un incubateur important pour que les gens trouvent du courage, une communauté, une famille. Et ensuite, à partir de là, être capable d’exister en dehors de ça.


Portraits of Papi Juice.Portraits of Papi Juice.

Comment les espaces, qu’ils soient nocturnes ou non, explicitement queer ou non, peuvent-ils être plus inclusifs ?

Oscar : En fait, nous avons un atelier complet d’une heure et demie sur ce thème si quelqu’un veut nous engager ! C’est une chose sur laquelle nous réfléchissons et travaillons constamment. Ça commence par l’intention et le fait de se poser des questions sur le pourquoi, le pour qui, et ce que l’on essaie de construire. Et vous pouvez continuer à évoluer à partir de là.


Mohammed : Quand il est question d’inclusion, une très bonne chose à prendre en compte lorsque vous examinez les espaces est « Qui n’est pas inclus » ? Je pense qu’il est important d’identifier pourquoi cela se produit et ce qui peut être fait pour y remédier.

Papi Juice est ancré dans le partage de l’espace. Comment avez-vous évolué depuis le début de la pandémie ?

Oscar : Nous avons définitivement fait une transition, et c’est là que c’est utile d’être un collectif artistique, nous avons dû être créatifs à un moment où il semble impossible de créer. Nous avons transféré une grande partie de nos activités en ligne l’année dernière et nous avons eu une année complète de programmation virtuelle, ce dont je suis très fier. Nous avons trouvé de nouvelles façons de nous engager auprès de notre communauté, que ce soit par le biais de nos produits dérivés, de notre série Mix ou de nos événements virtuels. Nous ne pensons pas seulement à l’espace physique, mais aussi à l’espace virtuel et spirituel.

Qu’est-ce qui vous passionne ces temps-ci ?

Adam : Kaytranada et tout ce que Lil Nas X touche.

Oscar : Je me suis récemment mis à la méditation. Je prends cinq minutes de ma journée pour méditer et cela m’a beaucoup aidé pour mon humeur, mon anxiété et ma vision de la vie.

Notre ami Kelsey Lu a récemment donné l’un de ses premiers concerts, et nous avons la chance d’y assister. C’est une soirée que je n’oublierai jamais, non seulement parce que c’était magnifique, ou que sa fibre artistique était palpable, mais aussi parce que c’était comme la première représentation après une année sans spectacle. Avoir pu être là était extrêmement spécial.

Mohammed : J’ai beaucoup dansé à la maison, tout seul, en sous-vêtements après une douche. C’est vraiment bien d’avoir ce temps pour faire l’idiot et se sentir libre, puis de se préparer pour la journée.

Est-ce que vous vivez tous les trois à proximité les uns des autres ?

Mohammed : Absolument. Oscar est de l’autre côté de la rue. Adam est à deux pâtés de maisons de là. Et notre studio n’est qu’à quelques rues de là. C’est comme dans une sitcom ! J’ai l’impression que le confinement a provoqué quelque chose de vraiment intéressant, comme si nous vivions dans cette ville immense, et puis tout d’un coup, notre monde a été limité à trois pâtés de maisons. Notre écosystème de vie s’est rétréci littéralement, en bien.

Comment chacun d’entre vous décrirait-il son style personnel et comment a-t-il été façonné par ses expériences personnelles ?

Adam : Décontracté, skateur, gay de science-fiction.

Mohammed : Mon style est féminin et confortable, mais pas confortable au sens traditionnel du terme, mais plus comme ce qui me convient. Donc s’il y a une jolie petite robe bodycon courte dans laquelle je me sens bien, alors c’est comme ça que je veux me montrer.

Oscar : Je suis Balance, alors vous savez ? J’ai toujours beaucoup réfléchi au style. Je suis influencé par mon expérience en tant qu’immigrant latino homosexuel vivant à New York depuis 10 ans.

Qu’est-ce que vous allez porter pour votre premier événement post-pandémie de Papi Juice ?

Oscar : Un look du tonnerre !

Mohammed : Ça va être super hyper génial, c’est sûr.

Adam : Attendez pour voir.

Vous avez eu une année entière et quelques changements pour prévoir ces looks, donc ça doit être au point, mais pas de pression. Sur cette remarque, à quoi ressemble un Papi Juice post-pandémie ?

Oscar : Évidemment, le monde a bien changé, mais à New York, la vie post-pandémie semble proche en raison de la façon dont les vaccinations se sont déroulées ici. On parle beaucoup du retour à la normale, mais la normalité a été complètement redéfinie l’année dernière. Donc je pense que la première question est : « À quoi ressemble la normalité ? ». Je ne pense pas que nous sachions ce qu’est la normalité. Et donc, je ne suis pas vraiment sûr que nous ayons une idée de ce à quoi les choses vont ressembler. Je suis persuadé que je vais trouver, mais aujourd’hui, après l’année d’incertitude et de désespoir que nous avons eue, c’est vraiment difficile à dire.

Adam : Ce que sera la vie après la pandémie est encore flou. Mais j’ai aussi vraiment hâte d’y être. L’été semble être tellement proche. J’ai tellement hâte d’être dans les parcs avec mes potes. J’ai hâte d’être en sécurité dans la cabine du DJ, avec des gens qui dansent autour de moi, en passant des titres que j’aime, des titres que d’autres personnes aiment. Ce sont toutes ces choses que j’attends avec impatience, mais en temps voulu et avec les bonnes mesures de sécurité.

Mohammed : Avant la pandémie, certaines de nos fêtes pouvaient rassembler jusqu’à 2 800 personnes. Je ne vois plus comment autant de personnes peuvent se réunir. Du coup, c’est forcément un peu anxiogène. Mais en pensant au jour où notre communauté pourra à nouveau partager un espace, quelque chose me vient à l’esprit : la gratitude. J’ai vu quelque chose de sympa sur Twitter qui disait : « J’ai hâte de revoir les amis de mes amis », vous savez, ces gens qui ne sont pas vraiment vos amis, mais que vous aimez voir autour de vous ? Je pense que nous serons reconnaissants de partager à nouveau cet espace, de chanter avec un étranger à côté de nous, de nous faire des amis dans la queue des toilettes, de discuter dehors avec le videur pendant une demi-heure. Tout ça me manque.

Enfin, que faites-vous pour la Pride cette année ?

Papi Juice : On essaie de se remettre dans le bain après 15 mois sur le banc de touche ! Il est temps de nous remettre en piste, voilà tout ! La sécurité, l’intentionnalité et la capacité de vivre au ralenti sont des éléments clés pour nous, dont certains sont nouveaux et d’autres font partie de nos valeurs depuis le tout début. Nous programmons des projets pour l’espace public, pour les jeunes trans et pour notre grande et belle communauté afin de célébrer huit délicieuses années.

Venez nous voir les 6, 12 et 26 juin !

Portrait of Papi Juice.Portrait of Papi Juice.

Photo Credit: Neva Wireko

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